P. AZRIA (Kingcom) : «Avec l’explosion des réseaux sociaux, les enfants influenceurs sont de plus en plus nombreux»

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Alors que l’influence commerciale se professionnalise et s’impose à tous les acteurs du marketing, l’agence Kingcom a publié un livre blanc, proposant ainsi un état des lieux du marché et les perspectives. L’occasion pour mediaCom’ d’évoquer ces pratiques avec Pascale AZRIA, Directrice générale associée chez Kingcom. 

Que représente aujourd’hui l’influence commerciale ? 

Pascale AZRIA L’influence commerciale n’est plus une simple tendance, c’est une réalité de masse. Un tiers des Français suit des créateurs de contenu en ligne. Que ce soit pour s’informer, échanger, se divertir ou consommer, les influenceurs ont pris une place prépondérante dans le paysage digital, façonnant nos décisions et nos perceptions. Mais, à mesure que l’influence grandit, ses excès se révèlent. Les scandales ont fait la une, les pratiques douteuses ont semé le doute, et la régulation s’est imposée comme une nécessité. Avec la loi du 9 juin 2023, le cadre est posé : plus clair, plus structurant, plus protecteur. L’influence n’a jamais eu autant de potentiel pour être performante, authentique et durable. 

MEDIACOM Quel a été l’impact de la loi Influence sur le marché ? 

Pascale AZRIA La France s’est imposée comme pionnière en structurant légalement le secteur de l’influence commerciale. L’objectif était de transformer un marché en pleine expansion en un écosystème de confiance, où transparence et responsabilité sont les piliers. Cette régulation renforce la crédibilité des influenceurs et des marques en instaurant des règles claires comme la transparence des partenariats, la contractualisation obligatoire, ou encore la responsabilité partagée. Aujourd’hui, 56% des influenceurs estiment que la loi sur l’influence contribue à l’évolution positive de leur métier. Si la loi a posé un cadre, son efficacité repose sur l’implication de l’ensemble des acteurs du marché. En 2024, seuls 2.000 influenceurs sur 150.000 en France étaient certifiés «influenceur responsable» par l’ARPP. 

MEDIACOM Avec ce cadre, allons-nous vers une influence plus responsable ? 

Pascale AZRIA L’influence commerciale a besoin de règles, mais une sur-régulation risquerait de la dénaturer. Trop l’encadrer pourrait nuire aux marques, aux créateurs et aux consommateurs, freinant ainsi tout un écosystème en plein essor. Pour aller vers une influence plus responsable, l’auto-régulation doit être la règle n°1. Pour faire de l’influence un levier de transformation écologique, il est essentiel de sensibiliser et former les influenceurs aux enjeux environnementaux, encadrer l’envoi de produits pour limiter le gaspillage, mais aussi de lister les preuves concrètes des engagements de la marque. Les influenceurs et leaders d’opinion peuvent jouer un rôle clé dans l’adoption de comportements et de modes de vie sobres en carbone. 

MEDIACOM Quel regard portez-vous sur les enfants influenceurs ? 

Pascale AZRIA Avec l’explosion des réseaux sociaux, les enfants influenceurs sont de plus en plus nombreux, soulevant des questions éthiques et juridiques majeures. 85% des parents influenceurs publient du contenu mettant en scène leurs enfants au moins une fois par semaine. La loi Studer a marqué une avancée en imposant un temps de travail limité, pour éviter l’exploitation des mineurs, une gestion encadrée des revenus, afin de leur garantir un accès à leurs gains à leur majorité, un droit à l’oubli numérique, permettant de retirer leurs images des plateformes… Mais ces mesures ne sont pas assez connues et parfois mal appliquées. Alors, avant de vouloir réguler de nouveau, faisons déjà de la pédagogie autour de ces bonnes pratiques et formons les acteurs pour assurer une réelle protection aux mineurs. 

MEDIACOM Les marques doivent-elles désormais laisser carte blanche aux influenceurs ? 

Pascale AZRIA Lorsqu’une marque cesse de vouloir tout maîtriser, elle gagne en crédibilité et en impact. Les influenceurs, en restant fidèles à leur ton et à leur univers, renforcent l’adhésion de leur communauté et créent des messages plus percutants. Ce passage d’une communication rigide à une cocréation fluide transforme l’influence en une véritable expérience de marque, plus immersive et alignée avec les attentes des consommateurs. Les nouvelles tendances montrent que les formats interactifs et immersifs génèrent une connexion et un engagement bien supérieur aux contenus traditionnels. Pour exemple, 92% des consommateurs font davantage confiance aux UGC qu’aux publicités traditionnelles, ou encore que 65% des consommateurs estiment que la réalité augmentée facilite l’expérience d’achat.