Les agences sont de plus en plus confrontées à une problématique : le non-dédommagement dans le cade des consultations, qui met en péril les business model. Aux côtés d’autres acteurs engagés, OVAL a décidé d’agir en proposant une contribution partagée entre le budget de l’agence et celui du client. Zoom sur cette démarche avec Mathieu BADIE, Directeur général OVAL France.
MEDIACOM Quelle est l’expertise de l’agence OVAL ?
Mathieu BADIE Nous sommes une agence créative européenne et nous nous donnons pour mission de faire vivre les marques, leurs produits, leurs services, leurs promesses et/ou leurs engagements en concevant et produisant des expériences à impact positif. Nous venons de l’événementiel et nous avons choisi de capitaliser sur sa force et son impact «for real» pour le transposer sur tous les moyens de communication, c’est cela pour nous créer des expériences.
MEDIACOM Comment se compose votre portefeuille client ?
Mathieu BADIE Notre portefeuille client est très varié et non focalisé sur une industrie plutôt qu’une autre. Nous travaillons tant pour des clients publics comme Paris Aéroport, SNCF, MansA ou le Ministère de la Culture que pour des clients privés comme Decathlon, B&B HOTELS, Deloitte Université ou Pluxee.
MEDIACOM OVAL s’engage dans le sujet des compétitions d’agences. Quel est le problème ?
Mathieu BADIE Le problème est toujours le même : le trop grand nombre de compétitions qui ne respectent pas le travail engagé par les agences et donc les agences elles-mêmes. Qu’il s’agisse du nombre trop important d’agences interrogées, des délais trop courts donnés pour répondre, des budgets inadéquats par rapport aux besoins ou un niveau et nombre de livrables demandés au stade de la consultation, les conditions ne sont pas souvent réunies pour que notre industrie donne le meilleur d’elle-même alors même que c’est ce qu’on attend d’elles. Ces consultations ne sont pas indemnisées à la hauteur de la valeur créative délivrée et du temps passé par de nombreuses équipes. Cette situation, qui tend à se démultiplier ces dernières années, met clairement en péril nos business model.
MEDIACOM Comment répondez-vous à cette problématique ?
Mathieu BADIE Beaucoup de choses ont été dites, beaucoup de réunions organisées, beaucoup de chartes signées, beaucoup de promesses, mais rien n’a changé depuis des dizaines d’années. Alors nous avons choisi d’être créatifs dans notre façon d’aborder le problème, inspirés par l’agence orléanaise Atipic, en indemnisant symboliquement nos concurrents. Si nous remportons la consultation, dans le cas où l’annonceur ne le ferait pas lui-même, et dans des conditions qui nous semblent normales (3 agences interrogées (dont nous) et un budget d’au-moins 100.000 €), nous proposons de verser 1% du budget à chaque agence, dont 50% est pris sur le budget du client et 50% pris sur notre trésorerie.
MEDIACOM Financièrement, que représente la perte financière d’une agence lors d’une compétition ?
Mathieu BADIE Elle a été estimée à 32.000 € en moyenne par consultation dans une étude commandée par l’AACC. 32.000 € par compétition, c’est plus qu’un équivalent temps plein au SMIC, c’est délirant. Participer à des compétitions peut devenir plus coûteux que de ne rien faire si le taux de transformation ne parvient pas à équilibrer l’investissement. Avec plus de 644.000€ investis chaque année pour répondre à des appels d’offres, nous sommes convaincus que notre secteur a besoin d’un modèle plus équitable et plus respectueux.
MEDIACOM Sur cette démarche, êtes-vous rejoints par d’autres acteurs du marché ?
Mathieu BADIE Nous avons suivi l’agence Atipic dans sa démarche et nous savons que de nombreuses autres agences sont intéressées pour nous rejoindre afin de former la plus large coalition d’agences possible et adresser ce sujet de concert, au service de toutes et tous. Cette démarche n’est pas une démarche OVAL, ni Atipic, c’est une démarche vertueuse au service de l’industrie et même de nos clients et il nous appartient donc de la partager et de convaincre le plus largement possible.
MEDIACOM Et les annonceurs, sont-ils touchés par cette problématique?
Mathieu BADIE Oui, bien sûr, c’est un cercle vicieux qui tire tout le secteur vers le bas et donc, in fine, les annonceurs eux-mêmes vers le bas. Nous assistons à une multiplication des projets pour lesquels est faite une consultation (et parfois des projets ridiculement petits), qui poussent les agences, pour assurer leur rentabilité, à s’engager sur de plus en plus de compétitions, donc à investir temps et énergie pour un résultat incertain, les plaçant dans une situation économique instable, créant une tension et une pression supplémentaire au niveau des équipes, de l’humain, et donc de la qualité de ce qui est créé qui, en plus doit être à un prix réduit par rapport aux livrables demandés.